Partout s'agitent comme des fourmis les thuriféraires de tout poil de la Saison de la Turquie en France (juillet 2009 – mars 2010). Pour marquer durablement cette turquerie, la Tour Eiffel revêt même les couleurs rouge et blanc du drapeau turc, du 6 au 11 octobre. Cette dernière initiative a toutefois suscité une levée de boucliers : « Le monument symbole de Paris et de la France sera illuminé pour la première fois de son histoire d'un croissant islamique... avec l'argent des Parisiens » (Le Point, citant les propos d'une femme politique du Front national d'Île-de-France); et pas seulement chez les identitaires pur jus...
Il est vrai que la Tour Eiffel fut érigée à l'occasion du centenaire de la Grande Révolution "française" , et que la Révolution mène à tout.
Pour couper court aux protestations, les organisateurs ont toutefois assuré que le croissant et l’étoile présents sur le drapeau turc n’apparaîtront pas sur le monument...
Cette Saison est bien sûr la première étape d'une formidable manipulation des masses visant à convaincre les Européens du bien-fondé de l'entrée de la Turquie en Europe. Ces enragés de la dhimmitude ne se rendent pas compte qu'à force de vouloir la Turquie en Europe, ils finiront par obtenir... l'Europe en Turquie !
Face à ce déferlement d'inculture médiatico-politique, il est réconfortant, spirituellement, de célébrer cette grande fête de Notre-Dame du Rosaire, qui commémore la victoire de Lépante du 7 octobre 1571 sur les Turcs musulmans. Instituée d'abord en 1572 sous le nom de "Notre Dame de la Victoire" par le pape saint Pie V, elle reçut son vocable actuel dès 1573 sous le pontificat de son successeur Grégoire XIII (le pape à qui l'on doit aussi le calendrier grégorien, en 1582). Cette fête, célébrée d'abord par une Confrérie, puis dans toute l'Espagne, fut enfin étendue à l'Église de rite romain en 1716, après une nouvelle victoire sur les Turcs.
Rappelons cette glorieuse époque où les Européens étaient unis autour d'un idéal religieux :
La Méditerranée était devenue le domaine de Soliman le Magnifique (qui meurt en 1566) et des pirates barbaresques, dont le trafic d’esclaves est l’une des activités dominantes. Soliman enlève la ville de Rhodes aux chevaliers de Saint Jean de Jérusalem en 1523, après des mois de siège héroïque, et tente vainement de s'emparer de Malte. C’est dans ces conditions que les Turcs concentrent toutes leurs forces vers l’île de Crète et Chypre (alors colonies vénitiennes), que le sultan Sélim II emporte en 1570 au terme d'une conquête brutale : plus de 20 000 habitants de Nicosie sont mis à mort. C'est l'élément déclencheur de la réaction européenne.
Conscient du danger pressant que constitue la gigantesque armada turque pour l’Europe et la Chrétienté, le pape Pie V fait preuve d’un sens du bien commun européen et perçoit la nécessité d'une unité européenne, par delà les rivalités et les guerres intestines qui divisent ses Princes. En France, Charles IX entretient des relations ambiguës avec les Turcs en vertu d’accords conclus du temps de François Ier; cette vision étriquée montre les limites d’une vision purement nationale, aveugle aux enjeux civilisationnels et géopolitiques. Venise, convoitée par le sultan, vit quant à elle une période de famine à la suite d’un gigantesque incendie.
Le pape convoque le Sacré Collège afin de déterminer la stratégie la plus efficace face à l’étroitesse de vue des intérêts nationaux.
Philippe II d’Espagne dépêche rapidement des troupes de Sicile, pendant que diverses flottes se constituent à Messine.
Le pape, poursuivant sa tentative d’unification des chefs européens, rencontre cependant de nombreuses réticences sous des prétextes futiles. Mais sa persévérance aura raison des divisions; il désigne un chef militaire unique pour la conduite des opérations : Don Juan d’Autriche (26 ans), fils de Charles Quint. Le 11 juillet 1571, le pavillon pontifical est hissé à Saint Pierre et Pie V bénit les combattants : « Allez au nom du Christ combattre Son ennemi et vous vaincrez ! ».
Le nonce du Vatican auprès des armées européennes et de la flotte demande que soit respecté un jeûne de trois jours avant l’appareillage. Les galériens sont détachés de leurs bancs pour se confesser et communier. On comptera pas moins de 80.000 confessions et communions. 220 galères européennes font face aux 300 galères turques.
La flotte turque était notablement composée de janissaires (enfants chrétiens réduits en esclavage, islamisés et élevés pour devenir soldats d’élite de l’islam turc).
La bataille a lieu le 7 octobre, dans le golfe de Lépante. Don Juan hisse le drapeau du Saint Père. Contre toute attente, les Turcs désemparés par le courage des Européens sont défaits. 30.000 d’entre eux succomberont contre 8.000 chez les chrétiens. Presque toutes les galères ennemies sont prises. L'amiral turc est fait prisonnier et décapité. 15.000 captifs chrétiens sont libérés.
De sorte qu’en 1571, la Chrétienté pouvait se dire enfin libérée du péril musulman qui l’avait terrorisée lorsque, par deux fois dans les décennies précédentes, les étendards rouge et vert du Turc avaient flotté devant les murs de Vienne, capitale du Saint-Empire.
Saint Pie V immortalisa cette victoire inespérée par une commémoration annuelle qui porte aujourd'hui le nom de Notre Dame du Rosaire. Saint Pie X, en 1913, en fixa la date au 7 octobre.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire